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Robert Bernier

En 2007, le photographe montréalais Nicolas Ruel entreprend son projet 8 Secondes. Huit secondes pour capter en photographie la vie urbaine sur les cinq continents du globe et témoigner des mouvements de la vie. Plusieurs dimensions de ce projet tiennent du défi. Le premier est technique : l’artiste s’impose comme règle de prendre chaque photo en double exposition avec un appareil photo numérique. Saisir le lieu, les gens, la lumière et le mouvement en deux prises de vue qui se superposent l’une à l’autre en l’espace de… huit secondes. Nicolas Ruel ne fait aucune retouche (outre la calibration des couleurs) avec un logiciel de traitement de l’image (comme Photoshop). La superposition ne se fait pas après mais pendant, ce qui en soi demande quelques prouesses. Va pour la technique. Le vrai défi demeure de capter la vie à travers ses moments furtifs qui s’additionnent sans que la technique impose son poids.

Depuis les premiers clichés à Paris, se sont ajoutés ceux de New York, Berlin, Londres… En fait, plus de cinquante villes dans une quarantaine de pays ont ainsi été photographiées. Dans chacune, Nicolas Ruel saisit quelques secondes de vie qui se croisent sans se voir dans la mouvance urbaine des grandes cités du monde. Chacune des villes a sa couleur, chaque instant a ses odeurs. L’autre défi pour l’artiste est de traduire cette réalité à travers la sienne propre dans la complexité que tout cela suppose sur les plans logistique, technique et artistique, sans oublier le volet humain. Fondamental. Cette idée géniale et ambitieuse a toujours conservé ses prémisses du départ : mettre en interaction deux réalités qui passionnent Nicolas Ruel depuis toujours, soit l’architecture et le mouvement. Et si au début de l’aventure de 8 Secondes l’architecture s’est imposée, au fil du temps son approche s’humanise, la dimension sociale prend sa place bien que la structure demeure. Et cela n’est pas étranger à son efficacité.

Chaque fois, la recette fait mouche. Pourquoi? Parce qu’il y a concordance avec l’artiste, avec le vrai, avec la vie. La réalité est un prisme. Chacune des images nous interpelle parce que le réel est davantage une perception qu’un état figé. Les sentiments, les émotions teintent la vision que nous avons du monde, et la beauté de la chose, c’est que cette déformation se conjugue à des milliards et des milliards de sources de vie qui, elles-mêmes, s’expriment à travers des myriades d’instants et de moments furtifs dans des espaces physiques et temporels qui embrassent l’infini. Et puis, les photographies de la série 8 Secondes nous touchent parce qu’elles sont belles!

L’exposition présentée ce printemps à Toronto à la Thompson Landry Gallery se concentrera sur trois villes : Toronto, New York et Paris. Les photos sont offertes en tirage unique au format de 122 x 183 cm et en tirage de 5 exemplaires au format de 101,5 x 152,5 cm. Les impressions sont faites sur des plaques d’acier inoxydable et le résultat est sensationnel. Des oeuvres qui méritent tout notre respect! À voir sans mesure.

Nicolas Ruel
Iconography
Du 21 mars AU 15 avril 2013

THOMPSON LANDRY GALLERY
32, Distillery Lane
Toronto, Ontario
416 364-4955
thompsonlandry.com