Pour souligner les 80 ans de l’artiste
Georg Baselitz
FONDATION BEYELER
Jusqu’au 29 AVRIL 2018
Baselstrasse 101, 4125 Bâle, Suisse
https://www.fondationbeyeler.ch/fr/
L’artiste voit le jour en 1938 à Deutschbaselitz, village de Saxe auquel il empruntera son nom. Cette partie du pays sera incorporée en 1949 à la République Démocratique Allemande où il entamera ses études, mais qu’il quittera à 19 ans pour s’inscrire à l’Académie des Beaux-arts de Berlin-Ouest, mieux adaptée à son évolution. Après une première exposition personnelle en 1963 où son homme nu se masturbant fera scandale, c’est en 1969 qu’il entamera sa série de tableaux aux têtes et motifs renversés. Ce parti-pris esthétique radical né du désir de transmettre des émotions par le canal d’une forme qui les suggère, va l’inscrire dans l’avant-garde d’une époque déjà bousculée par l’arrivée en Italie de l’Arte Povera, George Baselitz sera dès lors un artiste dont on suivra de près l’évolution.
Sur la première, par exemple, de 1979, tête, seins, sexe, yeux protubérants, nombril indiqué par une simple incision, autant de gestes limités mais à forte répercussion autour d’une pensée unique basée sur la déchirure. Lui succède Tête tragique, bouleau et peinture à l’huile, avec cette fois une découpe de seins au carré et nez rouge soulignant un ridicule, d’un primitivisme assumé tout en étant retenu. . Aussi des réductions radicales, comme un Sans titre de la même année, jouant toujours sur le contraste entre la tendreté du matériau et l’image rugueuse que l’artiste en tire, d’un geste délibéré sans être brutal. Une autre Sans titre en hêtre pourpre, haute de 2m50 datant de 1982, qui se trouve aujourd’hui au Kunstmuseum de Bâle, d’un effet monumental que n’aurait pas désavoué Bourdelle, force émergeant chez Baselitz du bois comme chez l’autre du bronze dans lequel son gigantisme est coulé .
L’histoire aussi va trouver un écho dans sa démarche artistique. Il n’a pas grandi sans dommage dans une Allemagne en pleine débandade. Il allait en naître, en 1990, l’impressionnante série des Femmes de Dresde, en l’honneur de celles qui s’attelèrent à remettre en route leur ville quasi entièrement détruite en 1945 sous les bombardements de l’aviation alliée. Hautes de 1 m à 1m50, ces 13 têtes de femmes au visage entaillé, avec leurs yeux qui se dessinent en creux, sont badigeonnées d’une peinture jaune ocre absorbée par le bois, neutralisant ainsi la lumière pour en augmenter l’effet.
Paquerette Villeneuve