Une vente improvisée
Les commentaires sont nombreux autour de la vente du Chagall, La tour Eiffel, par le Musée des beaux-arts du Canada et parfois, ils amènent le débat bien loin des véritables enjeux. Néanmoins ils suscitent une question fondamentale; les musées peuvent-ils vendre des œuvres? Cette question est d’autant plus importante si l’on considère les faibles moyens dont ils disposent pour faire des acquisitions. Et cela fait surgir une autre question; quelle est la légitimité d’une telle initiative face aux dons effectués par des collectionneurs à nos institutions.
Si la vente d’œuvres par les musées est rarissime ici, ce n’est pas le cas, par exemple, pour les musées américains. Actuellement, le Moma (Museum of Modern Art, à New York) l’un des plus importants musées dans le monde termine une vente (qui aura durée plus de neuf mois) de plus de 400 photographies dont plusieurs de créateurs majeurs du début du 20e siècle jusqu’à la période d’après-guerre, dont Alfred Stieglitz , Edward Steichen , Edward Weston , Man Ray , Henri Cartier-Bresson et Walker Evans. Cela est possible parce que ce musée a beaucoup de profondeur. Ses collections regorgent d’œuvres. Dans ce cas précis, il s’agit de doublons ou de photographies jugées non essentielles et non pertinentes dans l’ensemble de ce fond. La tâche de vendre les photographies a été confiée à la Maison Christie’s. Darius Himes, responsable international des photographies de Christie dit que la maison de vente aux enchères voulait offrir les 400 œuvres « d’une manière digestible. »
Les ventes s’échelonnent sur neuf mois, elles prennent fin ce mois-ci, en avril et elles s’effectuent seulement en ligne. Les prix varient de 1 000$ à 300 000$ US. Les vedettes de cette mega-vente sont deux Man Ray de 1923 et 1928, étaient estimés respectivement entre 200 000 $ et 300 000 $ pour l’une et entre 150 000 $ et 250 000 $ pour l’autre, (en US dollars). Elles ont été offertes lors de la vente du 10 octobre dernier. Les «radiographies» de Man Ray sont des œuvres que l’artiste a réalisés sans appareil photo en plaçant des objets directement sur une feuille de papier photosensible et en l’exposant à la lumière.
Une telle vente n’est pas un cas isolé. Le Moma a déjà eu recourt dans le passé à la même stratégie. Le but? Améliorer la collection en permettant d’ajouter de l’argent à son fond d’acquisition comme pour le Musée des beaux-arts du Canada actuellement. Mais il y a une différente importante. Le Musée des beaux-arts du Canada ne possède que deux huiles de Chagall. Oups. Les motivations expliquées par le directeur de l’institution, Monsieur Marc Mayer, sont souvent, soient inexactes ou/et floues, sans parler du reste…
Concernant les collectionneurs qui ont fait don. Si on met les choses dans le contexte de l’amélioration des collections, et qu’il s’agit bien d’œuvres non-significatives, si cela est pour donner plus de moyen à l’institution pourquoi pas. De plus, les dons faits à un musée de la couronne ne sont pas sans gratification. Cependant, une telle opération doit être basée sur des faits véridiques et doit aussi s’inscrire dans une stratégie logique. Ici, ce n’est pas le cas.